© Simon Wagner Fédération vaudoise des entrepreneurs

Haut de gamme très GAM 

Annie Admane – Info Métal 2021 Fédération vaudoise des Entrepreneurs

Constitué il y a cinq ans, le Groupe d’artisans du métal, GAM, vit de l’engouement de ses membres pour leurs métiers qu’ils ont su porter à un niveau remarquable de qualité. Avec le temps, leur renommée s’est confirmée et ce qui était un simple consortium s’est transformé en une SàrL qui ne ressemble à nulle autre.

Le souffle de la passion, la flamme créative, le geste maîtrisé, et l’affinité des caractères : ces artisans-là, hommes et femmes des métiers du métal, ont dans les veines l’amour du travail bien fait et dans les mains un savoir-faire qui prend source dans la grande tradition de la serrurerie, de la forge et de la fonderie. Avec l’intelligence d’allier l’expérience des seniors aux acquis des plus jeunes, mais aussi d’utiliser tout ce que la modernité offre de facilitation, car la bienfacture n’a pas d’âge ni d’époque.

Au cœur du métal

Si vous allez les voir, à La Sarraz, à La Filature, une ancienne usine réaménagée en surfaces d’artisanat, ne vous attendez pas à des bureaux rutilants ni à des ateliers dernier cri. Non; ici, l’univers du métal a accaparé de vieux murs dont les façades affichent le vécu. Dans les locaux du Groupe d’artisans du métal – GAM –, la lumière du jour filtre en larges faisceaux qui éclairent de vastes et hauts espaces.

L’atelier de construction métallique occupe une longue halle ; des profilés en U, en L, ou carrés sont empilés à côté des établis; plus loin, des machines, des fers façonnés accrochés aux murs, et de nombreux outils, bien alignés. Il y a aussi de longues étagères où sont rangées de petites boîtes emplies de pièces récupérées au hasard de travaux de restauration – des trésors !

Dans la forge, l’ambiance est plus sombre mais le feu y étincelle et le son du martelage vibre dans l’air. Une enclume, posée juste à côté d’un impressionnant marteau-pilon, semble bien dérisoire.

Et puis la fonderie. Un grand chien blanc à l’air indifférent s’est couché devant la porte ; l’atelier est-il plus récent ? Il semble plus moderne que les précédents. Sur un large établi, un sable couleur ocre rouge, si fin qu’on peut le modeler entre les doigts, a servi au moulage en bronze du logo de GAM ; ce seront de petites plaques à visser sur les ouvrages. Les artisans ont effectivement décidé de signer leurs réalisations, parce qu’on leur a suggéré de le faire.

Des châteaux au design contemporain

Léonard DuPasquier, ferronnier d’art, est, avec Joseph Currat, forgeron-ferronnier-serrurier, l’un des deux fondateurs du groupe : «Nous avons d’abord débuté en consortium, en 2013, avec une première soumission pour la restauration des ouvrages métalliques du Château de l’Aile, à Vevey : garde-corps, serrures, lanternes, girouettes, etc. Puis nous avons continué avec des travaux au Château de Grandson.» En 2016, le chantier veveysan qui était toujours en cours, a permis aux deux artisans de se faire connaître ; d’autres voulaient les rejoindre. « C’est alors que nous avons décidé, Joseph et moi, de constituer une SàrL, par sécurité et pour des questions d’assurance. » La transition du statut d’indépendant à celui d’entrepreneur s’est faite lentement et le Groupe s’est agrandi au fil du temps. Aujourd’hui, ils sont huit, six hommes et deux femmes. Si les travaux de restauration du patrimoine représentent globalement 60 % de leur activité, ils proposent aussi un large éventail de prestations et de réalisations, dans tous les métaux, mixant les techniques à l’ancienne et la digitalisation en 3D pour reproduire des objets de jadis ou en fabriquer de très contemporains. Il faut dire qu’ils possèdent des métiers variés, formés en bonne et due forme, mais sont aussi autodidactes. Le dialogue avec les artistes,  musiciens, plasticiens, est également une source de créativité. Joseph cite, parmi les réalisations les plus marquantes du Groupe, « Le Château de l’Aile, pour lequel on nous a demandé d’aller très loin dans nos savoir-faire, et un escalier monumental que nous avons réalisé pour le restaurant du chef Philippe Chevrier à la rue du Rhône, à Genève. Il y a aussi le Château St-Maire à Lausanne… » Prestigieux, de toute évidence, mais les ateliers sont aussi ouverts aux plus simples et anodines demandes : réparation d’une serrure, une poignée de porte, une garniture de bureau ; le métal n’est pas sectaire ; il est beau pour tout le monde.

L’état d’esprit, la symbiose

Le Groupe est bien plus qu’une simple entreprise ; c’est la complémentarité des générations, la stimulation réciproque, une expérience sociale – un salaire unique et pas de hiérarchie – qui s’est consolidée avec le temps, constate Joseph : « Notre complémentarité nous apporte beaucoup, mais c’est aussi un état d’esprit, des affinités. Tout cela s’est fait naturellement et chacun a trouvé la place qui lui convient. Certains travaillent plutôt au bureau, d’autres préfèrent le terrain ; certains font les deux ». Nathalie Jaggi, installée devant son écran, conceptualise un objet en 3D : « Je suis arrivée dans le groupe en 2014 et je m’y sens bien intégrée; avant, j’étais indépendante. Avec mon métier de mécanicienne de précision, j’apporte plus de technique ; c’est une autre approche. » Léonard souligne que la présence féminine sur un chantier modifie l’ambiance en contribuant à plus de calme.

Quant à l’avenir, « C’est radieux ! » s’exclame la jeune femme. De mieux en mieux organisés, ces artisans sont passés de la planche à dessin à l’informatique sans sourciller, et de nombreux projets de développement sont en phase d’essais et de tests ; « Cela nous porte, remarque Léonard ; on peut s’attaquer à de gros chantiers de restauration, nous avons la maîtrise. Nous sommes en permanence en réflexion sur les monuments historiques. » En équilibre entre passé et futur, le Groupe s’ouvre aux mouvances de la société, collabore avec le Centre professionnel du nord vaudois, tout en avançant à petits pas – « Nous n’avons pas la grosse tête » – ; effectivement, cela ne servirait à rien.